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Julie vient me voir en pleurant : “C’est le cinquième mec en trois ans ! À chaque fois, c’est pareil. Je deviens obsédée, je ne pense qu’à lui, et ça finit toujours en désastre. Pourquoi je n’arrive pas à apprendre ?”
Il faut le savoir : ce que Julie vit, ce n’est pas de l’amour. C’est de la limérence récurrente. Et non, ce n’est pas “romantique”. C’est un piège psychologique qui vous fait rejouer le même scénario traumatique en boucle.
La vérité sur la limérence récurrente
Quand on dit : “L’amour rend aveugle”… Il faut le savoir : C’est faux ! L’amour sain ne rend pas aveugle, il éclaire. Ce qui rend aveugle, c’est la limérence – cette obsession romantique qui transforme votre cerveau en distributeur automatique de dopamine détraqué.
La limérence récurrente, c’est quand votre psychisme reproduit sans cesse le même pattern destructeur : vous tombez en obsession pour quelqu’un d’inaccessible, vous vivez des montagnes russes émotionnelles, puis tout s’effondre. Et recommence.
En cherchant un peu, on se rend compte que cette répétition n’est pas un hasard. C’est votre cerveau qui tente désespérément de “réparer” un traumatisme relationnel précoce. Freud appelait ça la “compulsion de répétition” : l’espoir inconscient que cette fois-ci, ça marchera enfin.
Spoiler alert : ça ne marche jamais.
Le piège de l’attachement anxieux
Réalité check : 80% des personnes qui vivent de la limérence récurrente ont un attachement anxieux. Ce n’est pas une coïncidence.
L’attachement anxieux, c’est ce style relationnel qui se développe quand vos besoins affectifs ont été mal comblés dans l’enfance. Pas forcément par de la maltraitance – parfois juste par des parents émotionnellement indisponibles, imprévisibles, ou trop occupés.
Résultat ? Votre système nerveux a appris que l’amour était incertain, qu’il fallait se battre pour l’obtenir, et que l’abandon était toujours une menace. Votre cerveau recherche maintenant inconsciemment des partenaires qui reproduisent cette dynamique.
Marc, 35 ans, me raconte : “Je tombe toujours amoureux de femmes qui me font lanterner. Celles qui sont disponibles et gentilles avec moi, ça ne m’intéresse pas. Comme si mon cerveau avait besoin de souffrir pour ressentir quelque chose.”
Exactement, Marc. Votre cerveau confond intensité émotionnelle et amour. Il prend l’anxiété pour de la passion.
Le cercle vicieux neurologique
Il faut le comprendre : la limérence active les mêmes circuits cérébraux que la toxicomanie. Les neurosciences le montrent clairement : quand vous pensez à votre “objet limérent”, les zones de récompense de votre cerveau (notamment le système dopaminergique) s’activent exactement comme chez un toxicomane qui attend sa dose.
Mais voici le piège diabolique : comme dans toute addiction, vous développez une tolérance. Vous avez besoin de doses de plus en plus fortes d’incertitude et de drama pour ressentir la même montée d’adrénaline.
Sophie, 28 ans : “Au début, un simple message de lui me faisait planer pendant des heures. Maintenant, il faut qu’il disparaisse trois jours et qu’il revienne avec une déclaration passionnée pour que je ressente quelque chose.”
Le cortex préfrontal – responsable de votre capacité de jugement – est littéralement court-circuité par cette tempête neurochimique. Vous perdez votre capacité à évaluer rationnellement la situation.
Pourquoi vous choisissez toujours les mêmes profils
Démystifions une croyance populaire : “C’est le destin qui nous fait rencontrer les bonnes personnes au bon moment.” En réalité, votre inconscient vous fait foncer tête baissée vers les profils qui vont reproduire vos blessures d’attachement.
Les recherches en psychologie de l’attachement montrent que nous sommes attirés par des personnes qui activent nos schémas relationnels précoces. Si vous avez grandi avec un parent émotionnellement indisponible, vous serez magnétiquement attiré par des partenaires distants.
Ce n’est pas de la malchance. C’est votre système d’attachement qui cherche le “familier” – même quand le familier est toxique.
Prenons l’exemple type : vous êtes anxieux(se), ils sont évitants. Plus vous vous approchez, plus ils reculent. Plus ils reculent, plus votre système d’alarme s’active, plus vous devenez obsédé(e). C’est le cocktail parfait pour la limérence.
Cette danse est prévisible comme une horloge suisse. Mais votre cerveau amoureux vous fait croire que c’est de la “chimie exceptionnelle”.
La rumination : votre pire ennemie
Il faut le dire clairement : ressasser vos interactions avec votre objet limérent n’est pas de la “réflexion”. C’est de la rumination pathologique qui renforce votre obsession.
Chaque fois que vous décortiquez son dernier message, analysez son comportement, ou fantasmez sur votre avenir ensemble, vous renforcez les connexions neuronales de l’obsession. Vous creusez le sillon de plus en plus profond.
La rumination limérence suit toujours le même pattern :
1. Quelque chose d’ambigu se produit
2. Votre cerveau part en mode “détective” obsessionnel
3. Vous cherchez des “signes” dans le moindre détail
4. Vous construisez des scénarios de plus en plus élaborés
5. L’anxiété monte, la dopamine aussi
6. Vous êtes accro au cycle
Et pendant ce temps, vous ne vivez plus votre vraie vie. Vous vivez dans votre tête, dans des scenarios imaginaires.
Comment casser le pattern (pour de vrai)
Concentrez-vous sur une chose : vous n’êtes pas condamné(e) à reproduire ces schémas. Mais il va falloir faire le boulot.
Première étape : Reconnaissance brutale
Arrêtez de romantiser votre souffrance. La limérence n’est pas de l’amour profond, c’est un symptôme. Comme la fièvre signale une infection, la limérence signale un déséquilibre dans votre système d’attachement.
Deuxième étape : Sevrage relationnel
Comme tout sevrage, ça va être difficile. Coupez TOUT contact avec votre objet limérent. Pas de “restons amis”, pas de “juste pour prendre des nouvelles”. Zéro. Contact.
Votre cerveau va protester. Laissez-le râler. Les techniques d’exposition avec prévention de la réponse (utilisées pour traiter les TOC) sont efficaces contre la limérence.
Troisième étape : Reconstruction de votre sécurité interne
Travaillez votre style d’attachement. Apprenez à vous auto-apaiser. Développez des relations sécurisantes avec des amis, un thérapeute, des proches qui vous voient vraiment.
Quatrième étape : Réapprenez l’amour sain
L’amour sain, c’est ennuyeux au début quand on est habitué au drama. C’est stable, prévisible, sécurisant. Il n’y a pas de montagnes russes émotionnelles. Et c’est exactement ce dont vous avez besoin.
Le mot de la fin
La limérence récurrente n’est pas une fatalité romantique. C’est un pattern appris que vous pouvez désapprendre. Mais cela demande du courage : le courage de regarder vos blessures en face, de faire le deuil de vos fantasmes toxiques, et de choisir la sécurité plutôt que l’intensité.
Julie, six mois après notre première séance, me dit : “Je sors avec quelqu’un de bien maintenant. Au début, j’avais peur que ce soit ‘trop facile’. Maintenant je réalise que l’amour, c’est supposé être facile. C’est la souffrance qui n’est pas normale.”
Voilà. L’amour véritable ne fait pas mal. Si ça fait mal, ce n’est pas de l’amour.
Références scientifiques :
1. Wyant, B. E. (2021). Treatment of Limerence Using a Cognitive Behavioral Approach: A Case Study. Sage Journals, démontrant l’efficacité des techniques cognitivo-comportementales contre la limérence.
2. Willmott, L., & Bentley, E. (2015). Exploring the Lived-Experience of Limerence: A Journey toward Authenticity. The Qualitative Report, établissant les liens entre limérence, anxiété et dépression.
3. Van der Kolk, B. A. (1989). The compulsion to repeat the trauma: Re-enactment, revictimization, and masochism. Psychiatric Clinics of North America, expliquant les mécanismes de la compulsion de répétition.
4. Carswell, K., & Impett, E. (recherche en cours). Études neurobiologiques sur les circuits de récompense dans la limérence, montrant les similitudes avec les mécanismes addictifs.