Le pervers narcissique représente l’une des formes les plus insidieuses de manipulation psychologique. Contrairement aux idées reçues, ce profil n’est pas un simple trait de caractère difficile, mais une personne atteinte d’un trouble de la personnalité narcissique : un homme ou une femme qui présente une tendance à faire du mal à autrui et à manipuler ceux qui l’entourent, sans être soi-même affecté(e) et sans faire preuve d’empathie ou ressentir de culpabilité.

Il est essentiel de savoir identifier ces comportements pour protéger sa santé mentale et celle de ses proches. Voici 15 signes distinctifs qui permettent de reconnaître un pervers narcissique.

Les fondements psychologiques de la perversion narcissique

Avant d’aborder les signes concrets, il convient de comprendre que la perversion narcissique n’a jamais été un trouble clinique reconnu, contrairement au trouble de la personnalité narcissique. Le concept a été développé par Paul-Claude Racamier qui décrivait “Le pervers narcissique se fait valoir aux dépens d’un autre”.

Le trouble de la personnalité narcissique se caractérise par une tendance omniprésente à la mégalomanie, au besoin d’adulation et au manque d’empathie, avec une prévalence médiane de 1,6% de la population selon les études épidémiologiques.

Les 15 signes caractéristiques du pervers narcissique

1. Sentiment de supériorité exagéré

La personne a un sens grandiose de sa propre importance (p. ex., surestime ses réalisations et ses capacités, s’attend à être reconnue comme supérieure sans avoir accompli quelque chose en rapport). Le pervers narcissique se considère comme unique et exceptionnel, dévalorisant systématiquement les accomplissements d’autrui.

2. Absence totale d’empathie

Parce qu’il s’est construit dans un environnement dysfonctionnel duquel il s’est protégé en se coupant de ses émotions, il n’a pas d’empathie. Pire encore, il adore observer les autres souffrir en prenant un malin plaisir à manipuler ses victimes pour parvenir à ses fins.

3. Maîtrise exceptionnelle de la manipulation

Le pervers narcissique va chercher à avoir un pouvoir sur vous, à vous mettre sous emprise, c’est son carburant. Il va chercher à vous manipuler, vous faire perdre la tête dans le seul but d’assouvir cette soif de contrôle jusqu’à vous détruire psychologiquement.

4. Technique du gaslighting

Il utilise le gaslighting, une technique de manipulation mentale avec laquelle il cherche à faire douter sa victime de sa bienveillance voire, de sa santé psychologique. Cette stratégie vise à déstabiliser la perception de la réalité de la victime.

5. Besoin constant d’admiration

Les patients présentant un trouble narcissique ont besoin d’être admirés, leur estime d’eux-mêmes dépend du regard positif des autres et est donc généralement très fragile. Ce besoin insatiable les pousse à manipuler leur entourage pour obtenir la reconnaissance désirée.

6. Fantasmes de grandeur

Est absorbée par des fantaisies de succès illimité, de pouvoir, de splendeur, de beauté ou d’amour idéal. Ces fantasmes alimentent leur sentiment de supériorité et justifient leurs comportements manipulateurs.

7. Sentiment d’être unique et spécial

Pense être « spéciale » et unique et ne pouvoir être admise ou comprise que par des institutions ou des gens spéciaux et de haut niveau. Cette croyance les amène à mépriser les personnes “ordinaires”.

8. Exploitation systématique d’autrui

Elle exploite les autres pour parvenir à ses propres fins. Le pervers narcissique considère les autres comme des objets à utiliser pour satisfaire ses besoins narcissiques.

9. Isolement progressif des victimes

Le pervers narcissique isole ses victimes de leur entourage familial et amical pour mieux exercer son contrôle. Cette stratégie augmente la dépendance émotionnelle de la victime.

10. Projection et victimisation

Par ses techniques de manipulation, il arrive même à faire croire qu’il est en fait la victime de sa proie, en projetant sur elle ses propres caractéristiques. Se victimiser fait partie de ses manoeuvres, lui permettant d’attendrir ses victimes mais aussi, d’en garder le contrôle.

11. Réactions disproportionnées aux critiques

Ils sont sensibles et gênés par les critiques des autres et par l’échec, ils se sentent alors humiliés et mis en échec. Ils peuvent réagir par la fureur ou le mépris ou violemment contre-attaquer.

12. Arrogance et mépris

Elle est arrogante et hautaine. Cette attitude supérieure se manifeste dans toutes leurs interactions sociales et professionnelles.

13. Séduction initiale intense

Au début, ces personnes sont très polies humbles et bienveillantes. Mais lorsqu’elles gagnent la confiance et le respect de la victime, elles laissent des blessures, profondes, qui peuvent durer toute une vie.

14. Incapacité à reconnaître leurs torts

Inutile de penser qu’il peut changer ou guérir car il n’a tout simplement pas envie de changer, il se complaît dans sa perversité. Cette résistance au changement constitue l’un des aspects les plus décourageants de ce trouble.

15. Simulations d’émotions

Et lorsque vous pensez détecter des signes de sensibilité chez lui, il n’en n’est rien, il sait juste faire semblant, car feindre l’empathie émotionnelle fait également partie de ses techniques de manipulation.

L’impact neurobiologique : que révèlent les neurosciences ?

Les recherches en neurosciences apportent un éclairage scientifique sur les mécanismes cérébraux impliqués dans le narcissisme pathologique. Stefan Röpke de l’Université Charité (Berlin) et ses collègues ont mené une étude avec 34 personnes, dont 17 atteintes du trouble de personnalité narcissique. Dans une étude préliminaire, ils ont montré que ces dernières présentent un déficit de la capacité à éprouver de l’empathie. Dans la présente étude, ils ont également mesuré l’épaisseur du cortex cérébral au moyen de l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Les participants atteints du trouble présentaient des anomalies structurelles dans une région qui est impliquée dans les processus de compassion. Cette région était nettement moins épaisse.

Ces découvertes confirment scientifiquement l’absence d’empathie observée cliniquement chez les personnes présentant ce trouble de la personnalité.

Conséquences sur les victimes

Les relations avec les personnes atteintes de ce trouble sont marquées par des abus émotionnels, psychologiques, physiques, et parfois financiers. La victime tend à perdre toute estime de soi, à développer un stress important et une fatigue émotionnelle handicapante, à se remettre en question sans cesse.

Lorsqu’elles subissent un abus émotionnel constant, les victimes subissent un rétrécissement de l’hippocampe et un gonflement de l’amygdale, ces deux circonstances conduisent à des effets dévastateurs. L’hippocampe est crucial dans l’apprentissage et le développement des souvenirs, tandis que l’amygdale est l’endroit où les émotions négatives comme la honte, la culpabilité, la peur et l’envie prennent vie.

Comment réagir face à un pervers narcissique

Il est plus que conseillé à la victime de pratiquer l’indifférence afin de déstabiliser le pervers narcissique et d’ainsi tenter de desserrer son emprise.

S’il est possible de reconnaître un pervers narcissique facilement, il faut néanmoins garder à l’esprit que personne n’est à l’abri un jour, d’être sa victime. Pour ces dernières qui ont malheureusement connu la torture psychologique et parfois physique de ce bourreau, l’accompagnement psychologique auprès d’un professionnel de la santé reste la meilleure solution pour mettre un terme à l’emprise mais aussi pour se reconstruire intérieurement.

Conclusion

Reconnaître un pervers narcissique nécessite une compréhension fine de ces 15 signes comportementaux. La validation scientifique par les neurosciences confirme la réalité neurobiologique de ces troubles de la personnalité. Face à de tels individus, la meilleure stratégie reste la prise de distance et l’accompagnement thérapeutique pour les victimes.

Références scientifiques

Études en psychologie clinique :

• American Psychiatric Association. (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM-5). Washington, DC: American Psychiatric Publishing.
• Racamier, P.-C. (1986). Perversion narcissique. Revue française de psychanalyse.
• Eiguer, A. (1989). Le Pervers narcissique et son complice. Paris: Dunod.
• Hirigoyen, M.-F. (1998). Le harcèlement moral. Paris: Syros.

Recherches en neurosciences :

• Röpke, S., et al. (2013). Anomalies structurelles du cortex cérébral dans le trouble de personnalité narcissique. Journal of Psychiatric Research, Université Charité, Berlin.
• Hodgins, S. (Université de Montréal). Études sur les anomalies structurales de la matière grise chez les individus présentant des traits psychopathiques.

Études épidémiologiques :

• Dhawan, N., et al. (2010). Prevalence and treatment of narcissistic personality disorder in the community: a systematic review. Comprehensive Psychiatry, 51(4), 333-339.

Manuels de référence :

• Organisation mondiale de la santé. (2019). Classification internationale des maladies (CIM-11). Genève: OMS.
• Manuel MSD – Version professionnelle. (2023). Trouble de la personnalité narcissique. Éditions MSD.